Cinéma : « Villa Amalia » de Benoît Jacquot.
Un soir, alors qu’elle l’espionne, Ann voit son conjoint Thomas embrasser une femme sur le seuil d’une petite maison de banlieue. Alors, elle prend la résolution de le quitter, de tout quitter, de faire table rase de sa vie, de sa carrière de pianiste, de son identité de femme et de fille. Et il lui suffit de quelques jours pour vendre ses biens, se séparer des objets de son passé, des photographies et autres souvenirs, pour se métamorphoser physiquement et emprunter une nouvelle identité. Parce qu’il lui faut tout oublier, pour partir, pour devenir une autre, pour entreprendre ce long voyage qui la conduira jusqu’à cette maison abandonnée du sud de l’Italie, cette Villa Amalia dans laquelle pourra enfin s’opérer la renaissance, renaissance aux autres, au monde, à soi. Surtout à soi.
Benoît Jacquot est un réalisateur exigeant ; Pascal Quignard est un écrivain qui refuse toutes facilités littéraires ou romanesques. Il n’est donc pas étonnant que la rencontre de ces deux créateurs aux univers si particuliers aboutisse à un véritable film d’auteur, à la fois âpre, austère, rude, pas toujours aimable, à l’image de sa protagoniste d’ailleurs. Villa Amalia est en fait construit comme une quête initiatique. Le récit donne à voir et à sentir refusant volontairement de commenter, de proposer une quelconque explication rationnelle. Pendant une heure trente, le spectateur suit au plus près les pas d’Ann, cette femme qui décide tout à coup de devenir celle qui dit « non ». Avec elle, il marche, il court, il nage, il prend le train, le car, il traverse des paysages immenses et superbes. Il partage ses silences, ses regards, ses respirations saccadées. Il l’accompagne, tout simplement, dans ce cheminement symbolique qui la mène de la nuit pluvieuse du début à la lumière solaire de l’île où elle trouvera enfin un sens à son destin.
Une fois encore, Isabelle Huppert se révèle magistrale dans ce long métrage. Un geste, un regard, une mimique esquissée lui suffisent pour faire ressentir tout le désarroi du personnage qu’elle incarne. Pour laisser deviner sa force et sa faiblesse. Ses failles secrètes aussi. Aux côtés d’un Jean-Hugues Anglade sobre et tout en justesse, elle porte littéralement le film et l’irradie de sa présence magnifique.
Isabelle Huppert, une femme en quête d’identité et de sens…
Jean-Hugues Anglade, de retour au cinéma, dans un beau rôle.
Site officiel du film : http://www.villaamalia-lefilm.com/